Ha les joies de la dix-septième année passée sur cette planète bleue, entre insouciance puérile, euphorie et tracas insignifiants. C'est dans un tel contexte que je me suis vu, mercredi dernier, remettre mon véritable diplôme de citoyen, car désormais j'ai accompli ma BA de l'année 2006 : j'ai passé ma JAPD. Conclusion, constats, mords et remords d'une journée particulière...

Par JAPD, veuillez comprendre "Journée d'Appel et de Préparation à la Défense. En d'autres termes, le service militaire d'un jour. Avant tout chose, sachez que cette journée est devenue obligatoire, et vous permet d'acquérir un certificat d'aptitude nécessaire désormais à tout examen tel que, par exemple, le permis de conduire.

La mobilisation d'une simple journée dans l'enceinte d'un bâtiment militaire permet de faire (rapidement ?) le point sur des notions telles que la citoyenneté, les droits et devoirs, la démocratie, la guerre, la nation et, bien entendu, la Défense de notre Mère Patrie. Mais ce n'est pas tout ! En effet, le dépistage d'une quelconque lacune en français, l'apprentissage des "gestes qui sauvent" comme ils sont désormais communément appelés, sont aussi prévus dans le planning qui, vous l'aurez remarqué semble (j'ai bien dit semble) relativement chargé.

Une journée où les gradés sont donc principalement sensés motiver leur auditoire afin trouver des "vocations" d'hommes de troupes parmi ces jeunes délinquants que nous sommes, et cela coûte que coûte. Le rendez-vous se passe donc dans l'enceinte de l'escadron de gendarmerie mobile le plus "proche" de ma cambrousse inexplorée. On commence donc la journée par un petit déjeuner au frais du contribuable, viennoiseries, café et jus d'orange au menu. Quelques temps après, on rejoint la salle qui nous servira de dortoir tout au long de la journée qui s'annonce des plus palpitantes...

On attaquera donc ensuite l'ennemi de front avec une première séance vidéo, micro-trottoir et questionnaire à propos de la citoyenneté française, et de la chance que nous avons d'habiter dans ce magnifique pays. Rien de bien méchant, si ce n'est qu'une impression de déjà pour ceux qui ont un tant soit peu suivi une petite partie des cours d'éducations civique que l'on nous assène chaque année depuis le CM2. Rien de bien grâve, juste une sieste qui s'impose d'elle même. Après ce module de deux heures et une brève présentation de la Défense, une petite pause de dix minutes nous est donnée, le temps de se réveiller à l'air plutôt frais d'ailleurs.

Ces dix minutes hélas trop courtes à mon goût n'ont fait que soulever brièvement mes paupières qui retombèrent quasiment aussi rapidement à notre retour dans la salle. Le seul moyen de me réveiller fut l'annonce du test de français. Mais à la vue du questionnaire, QCM d'ailleurs, il m'est vite aperçu que ce n'était pas là une question de difficulté plus qu'une question de temps, ne serait-ce que pour remplir la première épreuve en une minute, montre en main. Je défis quiconque de remplir les trois pages en une minutes, je n'en ai fait qu'une seule, et ce n'est pas faute d'avoir chômé. On me rassure en me disant que je ne suis pas le seul, et que le lot de la valeur d'un carton de champagne à quiconque aurait rempli entièrement les cases à cocher dans le temps imparti n'a hélas jamais été gagné. Je retenterais ma chance une autre fois...

Passons à la suite. Une simple compréhension de texte des plus banales, la lecture d'horaires sur un programme de cinéma et une histoire de sac de bille dont il n'est en aucun cas question dans le texte[1], bref, pas de quoi fouetter un chat là non plus, ça fera plaisir à la SPA.[2] Le temps d'un deuxième module sur le but de la Défense, et c'est l'heure de la soupe.

Pour ce qui est du repas, ça ne ressemble pas encore aux rations de combat, mais encore moins au restaurants du Guide du Michelin... La surabondance de sauce et la plasticité des carottes n'ont malgré tout pas eu raison de mon solide estomac et de mon appétit à tout épreuve. La digestion fut courte avant la balade au hangar et l'attraction principale de la journée : la brigade cynophile en action.

Après un court avertissement concernant les potentiels détenteurs de substances illicites, ainsi que de la présentation de la technique de travail avec l'animal canin dont il me serait impossible de retrouver le nom exact, et la marque race. La démonstration fut impressionnante mais laborieuse à cause de l'état d'excitation de l'animal qui venait de retrouver son maître après un mois d'absence. Ce fut le moment le plus passionnant de la journée, je me dois de le souligner étant donné la rareté de ces épisodes captivants.

Retour dans l'amphithéâtre improvisé, et présentation des gestes de premiers secours avant la mise en pratique dans le gymnase situé à quelques bâtiments de là. Après quelques gestes maladroits accompagnés de rires et gloussements dignes de la plus grande basse-cour de France, voici notre Diplôme d'Initiation aux Premiers Secours qui nous est remis non sans quelques énervements de la part du personnel encadrant vis à vis des réactions immatures des petits monstres qu'ils avaient en face d'eux.

C'est enfin sur le quatrième et dernier module que s'achève la formation : les métiers de la Défense. La politique du "rentrez-y c'est bien" et du "y a que des avantages" semble faire son effet vu les quelques questions de mes collègues à propos de l'engagement et des qualifications. Un panorama bref mais ma fois assez intéressant des perspectives de carrière et des métiers divers et variés nous a été fait de manière non trop succincte ni complète, un point assez appréciable.

La fin ? Nous y voici déjà. 16h30, et la remise officielle des diplômes s'effectue, sous l'oeil impassible des deux sympathiques lieutenants nous ayant accompagnés tout au long de la journée. Non content d'avoir appris des tonnes de choses et d'avoir passé une journée terriblement intense et forte en émotions, me voici enfin comblé de me sentir enfin citoyen et d'avoir accompli mon rôle au sein de la société.

Maintenant que je suis citoyen, laissez moi faire comme les autres, dormir tranquille, regarder le foot à la télé et râler devant mon téléviseur... Peut-être voterais-je un jour pour éviter une catastrophe néo nazie lors du deuxième tour des présidentielles, mais pour l'instant je reste trop jeune. Citoyen oui, mais jugé encore trop immature pour voter. Tanpis, on attendra, c'est le lot de tous, et parfois quand j'en vois certains exprimer leurs idéologies, je me dis que c'est pas plus mal comme ça... ;)

Notes

[1] Ne pas se méprendre sur ma culture littéraire, c'est juste là un clin d'oeil à Joseph Joffo dont j'ai bien évidemment déjà lu le livre il y a de ça longtemps...

[2] C'est décidé, j'arrête l'humour douteux...