Aujourd'hui, le marché de la vidéo en ligne est en pleine effervescence et se partage en de nombreux secteurs diversifiés. Pour autant, de nombreux problèmes se posent et aucun business model n'arrive à se frayer véritablement de place sur ce marché. Au delà des faibles bénéfices générés, des problèmes de copyright et même désormais des problèmes d'infrastructures, ce sont les usages qu'il reste à faire évoluer vers une forme plus mature que ce qu'elle peut être aujourd'hui. Ensemble établissons un compte rendu de la vidéo sur Internet dans son ensemble pour tenter de dessiner sa silhouette de demain.

Vidéo

De la technologie aux usages...

L'insertion d'une vidéo aujourd'hui ne s'effectue que très rarement sans Flash, technologie propriétaire de streaming qui pose la problématique de l'intéropérabilité, le plugin Flash d'Adobe étant nécessaire à la lecture d'une vidéo et posant des problèmes de compatibilité sur certaines plateformes. Sa mise en place dans une page Web ne peut se faire sans l'insertion d'une portion de code (x)HTML généralement fournie par les sites de publication de vidéos la plupart du temps peu soucieux du respect des standards du Web.

Ensuite, les capacités de nos lignes téléphoniques ainsi que de nos infrastructures réseau limitent les données transférées, parfois même de manière drastique en fonction de notre géolocalisation (je vous rappelle que tout le monde n'est pas encore passé à l'ADSL). Cela contraint la publication de vidéos à des vidéos de petite taille et de piètre qualité, la compression des données étant obligatoire pour les débits asymétriques dont nous disposons.

Ces problèmes d'infrastructures conditionnent les usages que nous faisons de la vidéo sur Internet : courtes durées, qualité décevante, il ne nous est possible de visionner que quelques minutes de programmes courts. Ainsi, dans le but de fidéliser le client, les plateformes sont obligées d'agréger de nombreux contenus potentiellement en rapport avec le contenu visionné afin de le proposer au visiteur initialement de passage. Il est impensable de regarder des programmes longs auxquels des problèmes de copyright viennent s'ajouter à ceux déjà posés par les infrastructures.

Des tentatives de réponses aux besoins naissants

L'homme aime par nature s'inventer régulièrement de nouveaux besoins et aujourd'hui ces besoins viennent directement des frustrations que lui apporte la télévision qu'il regarde depuis si longtemps déjà. La vidéo en ligne n'est pour l'instant qu'une ébauche de ce que deviendra le remplaçant de cette TV si populaire. Regardons l'évolution de la télévision : tout a commencé en noir et blanc, puis est arrivée la couleur, la diversification des chaînes, l'arrivée du cable et de la télévision par satellite (offrant un bouquet de chaînes thématiques, du contenu payant ainsi qu'une bien meilleure qualité), des VHS puis des DVD pour enfin arriver aux platines d'enregistrement ou de lecture en différé du contenu.

Maintenant, regardez ce que la vidéo par Internet offre : des contenus encore plus diversifiés classés par thématiques (le plus souvent sous la forme de "chaînes"), la possibilité de téléchargement et de stockage de l'oeuvre visionnée (ou non) et la lecture au moment voulu du contenu. A part les problématiques de durée du contenu et de qualité, tous les atouts de la télévision ont peu à peu été intégrés à la vidéo en ligne, voire même parfois plus : l'abonnement à un contenu ciblé via RSS pour ne pas louper d'émission, la possibilité de réaction/interaction avec les éditeurs du contenu, l'association de contenu par thématique après visionnage et même pendant le visionnage pour pouvoir zapper à tout moment si le contenu ne me plaît pas, etc.

La première étape d'évolution s'effectue donc au fur et à mesure de l'appropriation des techniques télévisuelles. Reste à régler le problème de la qualité du contenu, ce que Joost ou Babelgum essayent de faire via leurs plateformes respectives basées sur un système P2P (Peer to Peer). Malheureusement, malgré les différents contrats signés avec des éditeurs de contenus, les offres vidéos proposées par ces nouveaux "médias" ne sont pas assez convainquantes pour la cible visée. La qualité de la vidéo reste également très décevante et les innovations ne sont pas au rendez-vous, mis à part la présence de widgets sociaux lors de la lecture.

Pour tenter de régler ce problème de qualité de l'image, il y a bien une solution proposée, j'ai nommé Stage6, la plateforme de diffusion de contenu vidéo créée par DivX qui ont réussi à mettre au point un système de compression sans perte ou presque : la qualité est bluffante et la mise à disposition de contenu en qualité HD est très appréciable, sourtout pour un visionnage plein écran, mais là encore le problème réside dans la forme propriétaire de cette technologie d'une part, et dans les trop faibles infrastructures de raccordement au réseau dont nous disposons d'autre part.

La vidéo en ligne a-t-elle finalement un futur ?

Bien évidemment, rien n'est encore joué pour la vidéo en ligne qui n'en est qu'à ses débuts. Des logiciels comme Miro que je vous ai présenté il y a peu sont incroyables en cela qu'ils proposent une nouvelle expérience utilisateur évolutive en agrégeant le contenu vidéo désiré, en le stockant et le gérant comme jamais auparavant. Cela pose la première pierre d'une ère qui va donner tout son sens aux technologies Media Center qui fleurissent depuis quelques temps sur nos PC portables ou PC de salon en proposant du contenu disponible en local (parfois même en qualité HD) et en proposant sa diffusion/gestion sur un écran de télévision.

A côté de ça, je pense que les plateformes du type Joost n'apporteront pas grand chose au marché tant que les accords qu'ils ne signeront pas ne concerneront pas les produits chouchous des grandes chaînes de télévision telles les séries américaines ou les divertissements. Ils ne seront utiles que par l'argent qu'ils insuffleront dans le marché et par la mise en place des premiers accords de diffusion de contenu qualitatif sur le Web. Ce sera une sorte de transition après laquelle ils devront soit évoluer, soit savoir s'effacer lentement au profit d'usages différents.

Les problèmes de copyright étant réglés par les accords mentionnés ci-dessus qui existent déjà pour d'autres types de contenu vidéo actuellement disponibles en ligne, ce sera finalement la monétisation qui devra véritablement s'inventer un modèle viable. L'intrusion de publicité pré/post visualisation risque de s'imposer comme un standard pendant quelques temps, au moins le temps de trouver une solution plus adaptée à la philosophie du Web, puisqu'étant déjà utilisée massivement sur la télévision.

Finalement, le véritable frein à cette évolution restent finalement les infrastructures réseaux : le très haut débit (fibre ou cable) devrait à son tour débloquer la situation, permettant le transfert de données conséquentes à travers le réseau, le tout de manière symétrique pour permettre à la fois le téléchargement (download) et le téléversement (upload) des données vidéos pourquoi pas en HD. Restera aux ISP (Internet Service Providers ou Fournisseurs d'Accès Internet) de revoir leur business model pour s'adapter à ce nouveau type de transfert de données extrêmement coûteux en bande passante.

En attendant tous ces changements, la télévision n'est pas encore morte, loin de là et il lui reste même de beaux jours devant elle. Ces changements, tant soit peu qu'ils se fassent, ne se feront pas en un jour et la transition sera longue. D'ici là, d'autres évolutions peuvent avoir lieu, changeant totalement notre vision de la vidéo online, la première étant l'apparition de la balise <video> avec la nouvelle version du langage HTML d'ici 2010, ce qui devrait révolutionner l'insertion de la vidéo dans les pages Web en permettant de concurrencer Flash dans ce domaine.

La vidéo sur Internet de demain, vous la voyez comment vous ?