A en juger par le nom de ce blog, s'il est une idée qui peut s'avérer être, en fin de compte, une obsession chez moi, c'est belle et bien celle de la liberté. Si je publie sur un blog, c'est pour conserver ma liberté d'expression et en faire un usage que j'espère bon. Si je milite pour le logiciel libre, c'est qu'il m'offre des libertés que je trouve essentielles bien qu'elles ne soient pas nécessaires au yeux de tous, telles la copie et le partage d'un logiciel ou encore l'inspection de son code source et sa modification. Campagnard par essence, je maudis parfois la ville par les limitations qu'elle nous impose par la promiscuité qu'elle instaure, tout comme je maudis la campagne lorsqu'elle rend plus difficile l'accès à la culture, au commerce ou encore à l'information. Cependant, il m'arrive de me demander jusqu'à quel point ce support d'expression qu'est le blog est un vecteur de liberté...

En effet, comme d'autres avant moi, j'ai vanté les mérites du blog pour une bonne et simple raison : le seul intermédiaire entre le rédacteur et le lecteur est un logiciel de publication qui sait s'effacer au profit du contenu. Qui me dit ce que je dois poster ? Qui m'empêche de publier tel ou tel article ? Personne. A moins que... cette personne à l'origine de nombreuses brides ne peut-être que moi et moi seul, rédacteur du blog. Et comme tout être humain digne de ce nom, d'une complexité incroyable, je m'impose des limitations, une sorte d'autocensure qui, va mner à la réduction du nombre de sujets abordés, à la suppression de brouillons de billets jugés trop provocateurs ou nombrilistes, j'en passe et des meilleures.

D'un côté, ce côté liberticide est ancré dans nos moeurs les plus profonds et même jusque dans les fondements de notre démocratie : les lois ne sont rien d'autre que des limitations qui sont paradoxalement destinées à préserver nos libertés les plus fondamentales. Mais doit-on nécessairement s'interdire de parler de tel ou tel sujet ? Doit-on réellement brider la potentielle spontanéité d'un blog en s'imposant de telles limites ? Je n'en suis pas sûr : la morale et l'éthique ne sont pas les seuls responsables de ces agissements liberticides, loin de là.

La détermination de la principale cause de ces agissements n'est pas si complexe que cela pour tout dire. Ne cherchez pas bien loin le coupable puisqu'il est devant vos yeux, ou plutôt devrais-je dire derrière vos yeux. Oui, le responsable de l'atrophie de nos libertés n'est autre que VOUS. Chers lecteurs, vous obligez chaque jour nombre de blogueurs à oeuvrer pour vous satisfaire. Cela signifie donc la mise en place d'une charte éditoriale, d'une éthique, à laquelle on ne peut bien évidemment pas déroger sans en pâtir soit par l'émission d'audieuses réflexions en commentaires, soit par le constat d'un impact certain sur les statistiques du blog en question.

Bien évidemment, cela ne fait qu'empirer avec la notoriété du blog : plus les lecteurs sont nombreux, plus ils sont exigeants et plus il devient difficile de tous les satisfaire. Dans certains cas extrêmes, cela devient même impossible. Reste pour le blogueur d'avoir les épaules et les nerfs assez solides pour continuer à bloguer dans ses conditions, quitte à décevoir certains de ses lecteurs, ou bien de se soumettre entièrement à leurs volontés et de devenir esclave sur son propre blog, là même où la liberté était revendiquée quelques temps auparavant.

Cela n'est pas sans faire de dégâts : certains, soucieux de ne pas sacrifier leur liberté décident d'arrêter à temps, tandis que d'autres blogs deviennent chaque jours plus impersonnels et ne méritent plus vraiment d'être appelés ainsi. Ils deviennent de simples sites, des vitrines actualisées au fil du temps, ni plus, ni moins. Mais bloguer reste avant tout une passion, un plaisir dont on se passe difficilement après y avoir goûté. Il n'est donc pas exclu que les "morts", comme on les appelle, surgissent de temps à autre de leur tombe pour goûter une ultime fois à ce plaisir, celui d'écrire, de publier et de se sentir vivant, et ce, en toute liberté.