L’éducation nationale se cherche sans pour autant se trouver. Autant chacun est d’accord sur le fait que des réformes sont nécessaires au maintient d’un niveau de connaissances minimal chez nos étudiants, autant aucune solution proposée ne semble satisfaire correctement cette condition. A l’ère du tout numérique, l’information et la connaissance évoluent et ne se diffusent plus de la même manière qu’il y a dix ans de cela. Si évolution il doit y avoir dans le système éducatif qui est le notre, elle doit se faire en symbiose avec la révolution numérique qui s’impose à nous.

Un système obsolète et inefficace

Le niveau baisse chaque année dans les classes du primaire et du secondaire. De plus en plus d’enfants ont des problèmes pour maitriser les bases nécessaires à leur accomplissement : histoire, sciences, lettres ou parfois même des compétences plus fondamentales telles la lecture et l’écriture. L’ère de l’immédiateté dans laquelle nous vivons y est certainement pour beaucoup : les informations que nous recevons sont sans cesses remplacées par de plus fraiches encore et l’enfant à du mal à sélectionner les plus importantes et à les assimiler.

Cette baisse de niveau se répercute à la sortie du lycée, lors de l’entrée dans le secondaire. Les professeurs de classes préparatoires aux grandes écoles avec qui j’ai pu discuter m’ont affirmer qu’ils étaient les témoins de ce phénomène. Mais si les exigences diminuent dans le secondaire, elles restent les mêmes dans le supérieur, ce qui signifie un plus grand effort à fournir pour l’élève rentrant dans un cursus universitaire.

Dans un monde changeant, les formations et compétences sont éphémères et nous savons que nous préparons des élèves à des métiers qui n’existent certainement pas encore. Le but est donc de favoriser l’adaptabilité à la connaissance, ce qui fait croire à tort à l’élève que l’apprentissage est inutile. En effet, pourquoi apprendre quelque chose qui sera dépassé d’ici quelques temps ? Seulement l’adaptation nécessite une solide base de connaissances à laquelle il est possible de confronter et de comparer toutes les situations rencontrées de manière à pouvoir faire les meilleurs choix possibles.

Faire de la technologie un allier

Au Danemark, le paris a été pris de donner accès à internet aux bacheliers pendant leurs examens à titre expérimental. Bien entendu, le raisonnement, le filtrage et l’analyse de l’information sont des qualités requises voire indispensables à l’époque de la surinformation et je me réjouis que ces compétences soient enseignées, mais elles ne doivent pas pour autant suppléer les compétences les plus traditionnelles et fondamentales. Si apprendre par coeur un cours d’histoire peut sembler bête et inutile et que savoir résumer la vie de Louis XIV à partir de documents collectés en ligne semble comporter un plus grand intérêt, il peut être plus intéressant encore d’étudier l’interaction des différents facteurs sociologiques, politiques et économiques de cette période pour en analyser les schémas et conséquences.

Faire un cours d’histoire à un élève pour lui faire un cours d’histoire n’a aucun intérêt : il faut lui enseigner à voir au-delà des dates et des noms pour percevoir le réel intérêt des connaissances qui lui sont apportées de manière à le concerner et l’intéresser. L’implication est une notion clé et pour cela, les nouvelles technologies peuvent être d’une grande aide : la favorisation de l’accès à des supports multimédias peut permettre à ceux qui le souhaitent de s’instruire de manière ludique.

A ce titre, le développement et l’enrichissement de solutions telles Curiosphère.tv permettant la vulgarisation de la connaissance doivent être soutenus par l’Etat. L’exemple du MIT qui a décidé il y a quelques années de cela de mettre gratuitement et librement à disposition ses cours sur la toile est également à suivre.[1] C’est le rôle de l’Education Nationale d’encourager les professeurs à distribuer sous licence libre leurs supports de cours et de leur fournir des solutions simples et efficaces pour les publier et les répertorier. Il s’agit là de petites mesures qui peuvent faciliter grandement l’accès à l’information.

Au delà de la diffusion de l’information, c’est sa nature qui est à revoir. Les cours magistraux ne sont pas efficaces car ils n’intéressent plus la nouvelle génération née avec l’interactivité du Web. Ils sont tout autant acteurs que spectateurs et désirent de prendre part entière à l’élaboration du cours. La participation en classe peut être complétée en dehors des heures de cours par la mise en place de plateformes sociales d’échanges entre les élèves et les professeurs permettant des discussions publiques et privées où il serait possible de poser facilement des questions sur le cours du jour ou d’échanger des compléments d’informations.

Il est une initiative très intéressante que je suis depuis quelques années déjà : le blog pédagogique du Cicla71. Le but de ce projet est de faire participer les élèves et de les faire réfléchir sur des problématiques autour du Web et de l’internaute (ses responsabilités, ses droits, ses devoirs…). Ce projet a le mérite d’impliquer les élèves en les faisant interagir entre eux, en les faisant utiliser les nouvelles technologies et en partageant les réflexions dont ils sont à l’origine sur la toile. Cherchez bien : tous les ingrédients y sont et les qualités pédagogiques d’une telle initiative ne sont plus à démontrer. Il serait bon de s’en inspirer pour étendre ce concept à d’autres domaines et d’autres cibles et de généraliser ce genre de pratiques.

Conclusion

Internet et les nouvelles technologies peuvent devenir un énorme atout pour l’enseignement si ils sont déployés de manière efficaces dans des projets novateurs. Il ne s’agit pas de remplacer le cerveau ou la mémoire par l’assistanat d’une base de données immense mais de compléter les méthodes pédagogiques actuelles par le déploiement de solutions alternatives et systématiques d’accès à l’information ainsi que par la mise en place de nouvelles approches pédagogiques tirant leur force des possibilités conférées aux nouvelles technologies. Les techniques d’apprentissages doivent plus que jamais s’adapter à la nouvelle façon de penser de la jeune génération.

Notes

[1] Je me suis moi-même surpris à suivre quelques uns de ces cours très bien menés et abordables par tout élève ayant au moins un niveau bac.