Le libre est une culture, une philosophie qui prône le partage et l’entraide. Ce dernier s’affirme chaque jour un peu plus et fait face à la crise économique sans broncher tant et si bien qu’il inspire de nouveaux modèles sociaux économiquesMais s’il est un domaine où la philosophie du libre doit prévaloir sur tout autre modèle de partage, où il est malheureusement encore en retrait, c’est bien l’éducation.

Le logiciel libre dans l’éducation

Quand on prononce le mot "libre", la première chose qui vient généralement à l’esprit est le concept du logiciel libre et pour cause : c’est l’exemple d’application le plus connu d’un modèle beaucoup plus général et englobant. Demandez à des jeunes de vous citer un exemple de logiciel libre, au mieux ils vous nommeront les plus classiques, de plus en plus systématiquement déployés dans les structures éducatives, avec parmi eux Open Office ou Mozilla Firefox; au pire, ils vous feront répéter la question, marquant leur ignorance sur le sujet par une mimique faciale des plus expressives.

Installer des logiciels libres dans les structures éducatives que sont les écoles, les collèges et les lycées est un premier pas vers la popularisation du libre et l’ouverture des jeunes à l’alternative. Il y a encore quelques années, Word, Works et autres suites bureautiques étaient des standards. Aujourd’hui, les élèves et étudiants sont confrontés à d’autres logiciels alternatifs sur leur lieu de scolarisation. Quels sont les avantages pour les étudiants ?

  • La connaissance de l’existence voire la maitrise totale (pour certains d’entre eux) d’une alternative gratuite à des logiciels parfois fort onéreux et considérés (à raison) comme indispensables;
  • L’apprentissage de l’adaptabilité nécessaire à l’utilisation de deux logiciels similaires mais néanmoins différents dans leur fonctionnement, leur procurant une plus grande aisance et dextérité avec l’outil informatique;
  • La possibilité d’installer sans aucun problème ces outils chez eux et de pouvoir continuer chez soi la conception ou rédaction d’un document commencé à l’école sans aucun problème de compatibilité;

Cependant la présence de quelques logiciels libres sur le parc informatique d’un lycée n’est ni suffisant, ni satisfaisant. Cette initiative devrait se généraliser à l’ensemble des logiciels éducatifs utilisés notamment dans le secondaire et les études supérieures. Prennons l’exemple de Maple, logiciel de calcul formel largement utilisé en CPGE et dont le montant de la licence s’élève à 100€ pour la version dédiée aux étudiants. Les frais des étudiants ainsi que du ministère de l’éducation se verraient à long terme drastiquement réduits par l’adoption généralisée d’un équivalent libre. On peut imaginer dans la même veine l’installation de postes sous OS libres dans le but de réduire les coûts inhérents à l’achat de licences Windows

Mais outre l’installation, l’utilisation et la familiarisation avec ces outils libres, elles doivent être accompagnée d’une initiation au concept du libre, à sa signification en terme de droits et de devoirs pour que ces logiciels ne soient plus aux yeux des néophytes que de simples logiciels gratuits. Car un logiciel libre est bien plus que cela et même un élève aussi jeune qu’il soit peut contribuer à son succès, que ce soit en rédigeant de la documentation ou juste en partageant ce logiciel avec ces amis, après avoir été informé qu’il s’agit là de son droit le plus stricte.

La culture libre

Le libre ne se limite toute fois pas aux seuls logiciels : il s’agit d’une culture du partage concernant de nombreux types de supports culturels, des écrits aux photographies, en passant par la musique, dont il est nécessaire d’enseigner les tenants et les aboutissants dès le plus jeune âge. Les élèves doivent savoir reconnaître un contenu libre d’un non libre, le partager en mentionnant son origine au besoin et choisir à leur tour la licence appropriée pour la publication de leur propre contenu.

Le libre introduit ainsi des concepts très intéressants auprès des jeunes : le partage des connaissances, qui couplé à l’usage d’internet voit son potentiel décuplé, le respect des droits d’auteurs ainsi que l’existence de licences plus ou moins restrictives. Ainsi ils apprennent à respecter les oeuvres et leurs auteurs et à partager de manière approprié le fruit de leur travail s’ils le trouvent potentiellement intéressant, ce qui peut être une satisfaction supplémentaire à l’obtention d’une bonne note ou d’une bonne appréciation.

Si Wikipédia prône le partage des connaissances, on peut imaginer un jour voir des élèves ayant effectué des recherches dans un domaine particulier améliorer un ou plusieurs articles du site avec le fruit de leurs découvertes et contribuer ainsi à l’élaboration de cette oeuvre collective dont chacun peut récolter les fruits.

Libérer l’éducation

Les élèves seuls ne sont pas concernés par le concept du libre : il est facile de songer à une implication des professeurs dans ce mouvement, avec notamment la __libération et la distribution systématique (totale ou partielle) des supports de cours_. L’éducation nationale pourrait mettre en place un site regroupant chacune des ressources de manière à rendre leur recherche et leur consultation plus aisée.

L’avantage est ici double : à la fois pour l’élève cherchant à se documenter sur un sujet précis, à combler une lacune ou à compléter un cours, mais également pour le professeur qui souhaite compléter ses supports, les comparer, les améliorer ou les diffuser plus largement. Si leur but est de diffuser le savoir, pourquoi se limiter à une diffusion locale ? Quoi qu’il en soit, un support de cours ne remplacera jamais le professeur, ses explications et ses remarques orales : qu’on-t-ils à y perdre ?

Le but d’une telle manoeuvre est de rendre automatique le partage des connaissances tout en s’assurant du respect des droits d’auteurs par la mise en place de licences libres ou autre Creative Commons. On pourrait même aller jusqu’à imaginer la conception de livres éducatifs libres de manière à réduire les coûts des manuels scolaires dans le porte-feuille des foyers français. Pensez alors à la facilité déconcertante pour l’élève ayant oublié son manuel d’aller consulter ce dernier sur internet ou même d’imprimer la page d’exercices dont il a besoin.

Conclusion

L’éducation plus que tout autre domaine à beaucoup à gagner grâce à l’intégration de la culture libre dans ses rouages. Non seulement cela permettrait à la fois à l’Etat et aux étudiants de faire des économies, mais cela permet de faciliter la diffusion de la connaissance, tout en inculquant des notions fondamentales aux élèves. Mais seuls quelques modèles parmi les plus évidents sont cités ci-dessus; on peut très facilement imaginer la mise en place de bon nombre d’initiatives bien plus innovantes encore basées sur le libre dont le seul but serait de donner à l’éducation un nouveau visage ou une autre dimension.