Il n’est pas rare que l’on me demande pourquoi j’aborde relativement souvent le sujet du libre sur mon blog, par ailleurs beaucoup plus éclectique auparavant. C’est une bonne question qui nécessite une réponse digne de ce nom à travers ce petit billet.

Tout d’abord, il faut savoir que je ne suis pas un libriste intégriste comme il peut y en avoir. Je m’intéresse certes au libre et je l’utilise quotidiennement, mais je sais également reconnaître les avantages du logiciel propriétaire (Stallman dirait plutôt "privateur") lorsqu’il y en a, et je suis parfaitement enclin à l’utiliser. D’ailleurs, au quotidien j’utilise à la fois Windows et Linux selon mes besoins.

Ensuite, l’avenir de notre société me préoccupe beaucoup. Ces derniers temps ont vu naître de grands bouleversements à la fois au niveau économique (avec la fameuse crise ont on parle tant) et au niveau social. Et au milieu de tout ça, on peut voir un modèle disruptif émerger, celui du libre. Il ressemble à la fois à une réminiscence des vieux modes de collectivisation et d’entraide qui existaient autrefois, mais également à une sorte d’OVNI, avec son lot d’innovations.

Et ce modèle semble affronter la crise sans coup férir. Face à lui, le libéralisme n’a pas le vent en poupe, loin de là et les entreprises classiques vivent des temps difficiles. Et honnêtement, cela fait réfléchir. Les arguments en faveur du libre sont nombreux (je ne vais pas y revenir dans ce billet, je les ai déjà longuement abordés sur ce blog); parmi eux, la pérennité et la fiabilité des applications ainsi créées.

Alors bien entendu, tout n’est pas si rose : on cherche encore certains modèles économiques et Wikipédia ne s’en porterait que mieux si elle était indépendante financièrement. Mais peu à peu, ce système arrive à maturation et dérange de plus en plus les entreprises bien ancrées dans le secteur en leur piquant quelques parts de marché par ci, par là.

Effectivement, tout ceci reste marginal. Mais en pensant à la transposition de tels principes à d’autres domaines que ceux du logiciel ou de l’art, on peut imaginer des choses incroyables. Il n’est pas dit que cela marchera, mais qui ne tente rien n’a rien. Le libre nous offre une ouverture différente sur le monde et une perspective sociale et économique totalement divergente des concepts actuels. Ca vaut le coup de s’y pencher un peu.

Ce qui est dérangeant avec le libre, c’est qu’on a presque l’impression que c’est une démarche naturelle, mais que nombre d’entre nous ont du mal à concevoir que cette démarche puisse aboutir. En effet, on utilise le libre pour le partage des connaissances depuis bien longtemps et je ne résiste pas à l’envie de partager avec vous cette magnifique citation de Knuth :

J’ai été formé dans la culture des mathématiques, et je ne suis donc pas habitué à faire payer les gens un penny chaque fois qu’ils utilisent un théorème que j’ai prouvé. Mais je fais payer les gens pour le temps passé à leur dire quel théorème s’applique. Faire payer les services, l’adaptation et l’amélioration, d’accord, mais ne rendez pas les algorithmes eux-mêmes propriétaires.

Ca vaut le coup d’y réfléchir non ? Qu’apportent les brevets si ce n’est un frein à l’innovation ? Il est peut-être temps d’envisager de penser autrement. Et actuellement, les seuls alternatives qui s’offrent à nous sont le Libre et l’Open Source. Peut-être que dans dix ans, je prêcherai pour un autre modèle socio-économique, mais pour l’instant, c’est celui qui est à mes yeux le plus raisonnable et le plus pérenne. L’avenir me dira si j’ai ou non raison.